Archives mensuelles : avril 2024

PatĂ©tico 1948-04-06 — Orquesta Osvaldo Pugliese

Jorge Caldara

Pour bien comprendre pourquoi cette version de PatĂ©tico interprĂ©tĂ©e par Osvaldo Pugliese est gĂ©niale, il faut la comparer aux deux autres enregistrements contemporains, par Anibal Troilo et Juan Deambroggio « Bachicha »  Mais surtout, il faut nous intĂ©resser Ă  son compositeur, Jorge Caldara, un gĂ©nie mort trop jeune. Pugliese a enregistrĂ© PatĂ©tico il y a jour pour jour 76 ans.

Extrait musical

PatĂ©tico 1948-04-06 — Orquesta Osvaldo Pugliese

Je vous laisse Ă©couter cette merveilleuse version, sans commentaire. Vous les trouverez cependant ci-dessous, en comparaison avec deux autres versions contemporaines.

Autres versions

Il me semble intĂ©ressant de comparer les trois versions enregistrĂ©es Ă  quelques mois d’intervalle. Je commence par le tango du jour, celle de Pugliese, puis une version de Bachicha mal datĂ©e, mais probablement lĂ©gĂšrement postĂ©rieure Ă  celle de Pugliese dans la mesure oĂč Jorge Caladara Ă©tait bandonĂ©oniste dans l’orchestre d’Osvaldo Ă  ce moment.
La troisiÚme version est celle de Troilo, enregistrée presque un an aprÚs celle de Pugliese.

Je vous invite à remarquer comme la version de Pugliese est différente dÚs les premiÚres secondes.

PatĂ©tico 1948-04-06 — Orquesta Osvaldo Pugliese
PatĂ©tico 1948 — Orquesta Juan Deambroggio « Bachicha »
PatĂ©tico 1949-03-30 — Orquesta AnĂ­bal Troilo

IntĂ©ressons-nous maintenant Ă  la vision d’ensemble des trois interprĂ©tations.

La partie verte représente le volume de la musique.
La partie à dominante rouge représente la hauteur du son. En bas (en jaune), ce sont les basses et en haut, les aigus.
On se rend compte à l’oreille et à l’Ɠil que la version de Pugliese est un peu plus sourde (moins d’aigus que celle de Troilo. Celle de Bachicha a des aigus, mais ce sont principalement les bruits du disque

Cela Ă©tant dit, il convient de remarquer la structure trĂšs diffĂ©rente des trois morceaux. Celui de Pugliese prĂ©sente des parties fortissimo et des parties piano. Vous remarquerez par exemple la partie oĂč est le curseur (ligne rouge verticale et fine) qui correspond Ă  une partie pianissimo (bas niveau sonore).
Dans la version de Troilo, les alternances de fortissimi et piani sont plus fréquentes et moins marquées.
La version de Bachicha est plus homogĂšne. On peut imaginer que la musique sera un peu moins expressive que dans les deux autres versions.
Sur les basses (partie inférieure en jaune), Pugliese les marque notamment avec ses cordes (contrebasse, par exemple).
Troilo les rĂ©alise avec les cordes, mais aussi avec le piano. Les instruments percutant en mĂȘme temps.
1 : 05 Pugliese ne met pas le long trait de violon qui Ă©tait si original au dĂ©but. Au contraire, c’est presque silencieux, ce qui crĂ©e un manque, un appel, une interrogation chez l’auditeur. Pour le danseur qui n’avait pas pu danser le premier, car tout au dĂ©but, c’est une frustration possible. Il s’attendait Ă  faire un truc « super » sur ce motif
Puisqu’on parle de cette partie, Bachicha, que ce soit au dĂ©but ou au milieu (1 : 08) remplit le vide par un motif ascendant au piano. Ce n’est pas une invention de sa part, il est Ă©crit ans la partition de Caldara. Pugliese a pour sa part, dĂ©cidĂ© de le supprimer totalement (lui qui est pourtant pianiste).Quant Ă  Troilo, il propose au contraire un motif de piano descendant et une petite fioriture au piano pour compenser, mais seulement dans la partie du milieu, vers 1 : 15.
Je vous laisse écouter les différences.
Pour vĂ©rifier que vous suivez bien le moment sur l’audiogramme, voici un petit jeu. Écoutez le morceau en suivant de gauche Ă  droite la zone verte. Si vous arrivez Ă  vous repĂ©rer pour ĂȘtre en phase avec les variations de volume, c’est trĂšs bien. A minima, essayez de terminer votre lecture visuelle en mĂȘme temps que la musique.

Pour terminer cette courte Ă©tude des interprĂ©tations, allons Ă  la fin du morceau. Écoutez la fin de Bachicha. Il dĂ©roule tranquillement la partition, sans crĂ©er d’effet de surprise. Les deux accords finaux (dominante et tonique) sont jouĂ©s avec quasiment le mĂȘme volume. Un vĂ©ritable « tsoin tsoin » final. J’ai une anecdote Ă  ce sujet, mais je vous la conterai une autre fois. Maintenant, bon, OK. J’étais habituĂ© Ă  dire « tsoin tsoin » Ă  la fin des morceaux. Ce tsoin-tsoin Ă©tait couvert par les applaudissements. Cependant, un jour, nous avons interprĂ©tĂ© un choral de Bach durant une messe. Le problĂšme est que dans ce type d’endroit, les gens n’applaudissent pas et que mon tsoin-tsoin a rĂ©sonnĂ© dans toute l’église. Vais-je dire que j’ai encore honte, tant d’annĂ©es aprĂšs. Peut-ĂȘtre, mais en tous cas, cela a exacerbĂ© ma sensibilitĂ© sur les fins de morceaux et les orchestres de tango sont un rĂ©gal pour cela, chacun cherchant Ă  donner sa signature.
Revenons Ă  nos moutons, ou plutĂŽt Ă  Troilo et Pugliese afin d’écouter leurs signatures.
Troilo reprend le motif du dĂ©part (qui n’est pas dans la partition originale) et termine avec un glissando Ă©norme du piano pour lancer finalement les deux accords finaux, dominante fortissimo et le dernier plus faible. C’est une fin superbe, il faut en convenir.
La fin proposĂ©e par Pugliese. Le rappel du motif initial est presque absent, si ce n’est quelques « coups » de volume de tous les instruments avec une fin qui s’estompe, comme un rĂȘve qui se termine. Le pathĂ©tique devenu insignifiant aprĂšs s’ĂȘtre tant gonflĂ© disparaĂźt d’une pichenette et retombe sur l’accord final comme une baudruche dĂ©gonflĂ©e.

Jorge Caldara (17 septembre 1924 – 24 aoĂ»t 1967)

Le compositeur du tango du jour est un jeune prodige. Tout gosse, il voulait devenir pianiste, mais son pÚre un tanguero un peu pingre rabattit ses ambitions au bandonéon.
Cela ne dĂ©couragea pas Jorge qui commença Ă  jouer dans des orchestres Ă  l’ñge de 14 ans et Ă  15 ans, il crĂ©a son propre orchestre, la Orquesta Juvenil Buenos Aires. (l’orchestre de jeunes de Buenos Aires) qui joua en alternance avec l’orchestre d’Anibal Troilo les mardis au CafĂ© Germinal (Avenida Corrientes au 942, au cĂŽtĂ© du CafĂ© Nacional, aujourd’hui thĂ©Ăątre Nacional Sancor Seguros). C’était un lieu prestigieux, voisin du cafĂ© Nacional avec qui il travaillait en doublette et en face des 36 Billares. De toute façon, chaque mĂštre de l’avenue Corrientes dans ces environs a des souvenirs de tango. Donc, avoir son orchestre Ă  15 ans et jouer dans la cour des grands, cela prouve le talent du bonhomme.
Évidemment, il a Ă©tĂ© remarquĂ© et Alberto Pugliese l’a fait entrer dans son orchestre comme bandĂ©oniste, jusqu’en 1944, date oĂč il a dĂ» effectuer son service militaire.
À la fin de son service, il intùgre l’orchestre du petit frùre d’Alberto, Osvaldo Pugliese.
Caldara prendra une place importante dans l’orchestre de Pugliese, toutes proportions gardĂ©es, comme Biagi avec D’Arienzo, grĂące Ă  son bandonĂ©on Ă©nergique qui marquait la cadence tout en dĂ©veloppant la mĂ©lodie. Caldara Ă©tait sensible Ă  un tango moderne, notamment Ă  celui d’Eduardo Rovira et je pense que cela l’a influencĂ© pour ses crĂ©ations Ă  l’époque de Pugliese, celui-ci pourtant novateur, n’a pris la dimension de Rovira que bien plus tard, notamment avec sa magnifique version de A Evaristo Carriego qu’il n’a enregistrĂ© qu’en 1969
 Je pense mĂȘme que Troilo auquel Caldara Ă©tait Ă©galement sensible avait de l’avance dans ce domaine par rapport Ă  Pugliese, notamment sur l’utilisation des chanteurs.
J’ai une thĂ©orie personnelle sur la question, mais je pense que la Yumba doit un peu Ă  la façon de jouer de Caldara, mĂȘme si Pugliese affirme qu’il l’a choisi, car il pouvait s’intĂ©grer parmi sa ligne de bandonĂ©onistes dĂ©jĂ  en place.

Osvaldo reconnut également ses talents de compositeurs, car il lui doit plusieurs de ses succÚs comme Patético 1948, notre tango du jour, Pastoral 1950, Pasional 1951 (avec Alberto Morån) et Por pecadora 1952 (avec Alberto Morån).
Le jeune Jorge Caladra vouait une dĂ©votion Ă  son nouveau chef d’orchestre et lui dĂ©dicacera un tango Puglieseando, qui est une merveille et que je vous propose d’écouter tout de suite :

Puglieseando

Puglieseando 1958-08-13 — Jorge Caldara

Le dĂ©but rappelle RĂ­e, payaso de Virgilio Carmona, notamment la version de D’Arienzo avec Bustos de 1959 qui possĂšde un tempo proche, a contrario de celle de 1940 (avec Carlos Casares) qui a un tempo beaucoup plus rapide. Jorge connaissait ce titre, car il l’a enregistrĂ©.
0 : 17 La Yumba chÚre à Pugliese apparaßt.
0 : 50 remarquez son bandonéon sensible et expressif qui lui permet de marquer le contraste avec les passages plus énergiques. Caldara était bandonéoniste.
Comme chez l’objet de son hommage, les parties avec un tempo marquĂ© alternent avec les parties glissĂ©es et suaves, notamment dessinĂ©es par les violons, le piano et les bandonĂ©ons plus staccatos contrastent, jusqu’à ce que à

2 : 30 les rĂ©ponses se fassent de plus en plus rapprochĂ©s, les changements de tonalitĂ©, font grimper la tension qui s’apaise dans une coda plus lente et un gros accord sur la dominante, suivi par un lĂ©ger rebond sur la tonique, dans un style complĂštement pugliesien.

Pasional

Si je vous dis que c’est aussi Jorge Caldara qui a composĂ© Pasional, un des plus gros succĂšs de Pugliese, vous avez pris la dimension de ce musicien. Voici sa version enregistrĂ©e avec l’immense chanteur Rodolfo Lesica sur des paroles de Mario Soto.

Pasional 1964 — Jorge Caldara — Rodolfo Lesica, sa composition qu’a rendu cĂ©lĂšbre Osvaldo Pugliese, mais ici par son compositeur et chantĂ©e par le grand Lesica.

Il a donc commencĂ© trĂšs jeune, mais il est mort aprĂšs moins de 30 ans de carriĂšre et surtout, ses premiers enregistrements comme chef d’orchestre ne datent que de la fin des annĂ©es 50, pĂ©riode oĂč le rock’n’roll et autres fantaisies avaient pris le pas sur le tango.

Principales compositions de Jorge Caldara

Ses tangos instrumentaux

  • Bamba, dĂ©dicacĂ© Ă  sa fille,
  • Con T de Troilo,
  • Cuando habla el bandoneĂłn, en collaboration avec Luis Stazo,
  • Mi bandoneĂłn y yo (Crecimos juntos),
  • Papilino, dĂ©dicacĂ© Ă  son fils,
  • Pastoral,
  • PatĂ©tico,
  • Patriarca,
  • Puglieseando,
  • Sentido en collaboration avec Daniel Lomuto,
  • Tango 05, dĂ©dicacĂ© Ă  la Fuerza AĂ©rea Argentina (armĂ©e de l’air argentine)

Ses tangos chantés

  • Pasional, avec des paroles de Mario Soto
  • Por pecadora, avec des paroles de Mario Soto
  • Muchachita de barrio, avec des paroles de Mario Soto
  • Profundamente, avec des paroles de Mario Soto
  • Paternal, avec des paroles de Norberto Samonta
  • No ves que nos queremos, avec des paroles de Abel Aznar
  • EstĂ©s donde estĂ©s, avec des paroles de MartĂ­nez
  • GorriĂłn de barrio, son premier tango (il Ă©tait lui-mĂȘme trĂšs jeune et donc comme un petit moineau de quartier).
  • Solo Dios vos y yo, dĂ©dicacĂ© Ă  son Ă©pouse, avec des paroles de Rodolfo Aiello

Jorge Caldara et ses orchestres

On a vu qu’il a fondĂ© son premier orchestre Ă  quinze ans avant d’intĂ©grer diffĂ©rents grands orchestres dont pour finir celui d’Osvaldo Pugliese, mais son parcours ne s’arrĂȘte pas lĂ , il reprend Ă  plusieurs milliers de kilomĂštres de Buenos Aires, au
Jorge Caldara a en effet passĂ© un an au Japon. La fameuse chanteuse Ranko Fujisawa l’ayant entendu jouer dans l’orchestre d’Osvaldo Pugliese Ă  Buenos Aires, l’a invitĂ© Ă  venir crĂ©er son propre orchestre au Japon.
FidĂšle Ă  son directeur, il n’a pas relevĂ© l’invitation, mais un peu plus tard, Ranko est revenue Ă  la charge et Jorge dĂ©cida de quitter l’orchestre d’Osvaldo Ă  la fin de 1954 et a dĂ©mĂ©nagĂ© avec sa famille.
Il y est restĂ© un an et y a gravĂ© ses premiers disques avec un orchestre composĂ© avec des musiciens japonais qu’il avait recrutĂ©s, mais aussi avec ceux de la TĂ­pica Tokio dirigĂ©e par le mari de Ranko

Il fut donc l’un des tout premiers, aprĂšs Juan Canaro, Ă  faire le saut vers le Japon. J’y vois encore une preuve de la qualitĂ© de cet artiste.
Parmi les titres gravés au Japon, je vous propose Recuerdo de Buenos Aires enregistré en 1955 et chanté par
 vous aurez deviné, Ranko Fujisawa.

Recuerdo de Buenos Aires 1955 — orquesta de Jorge Caldara con Ranko Fujisawa

De retour Ă  Buenos Aires, il monte un orchestre.

Parmi les titres enregistrés avec cet orchestre, je vous propose maintenant deux curiosités, mais le plus intéressant sera pour la fin de cet article


La Pena de James Dean 1958-11-13 — Jorge Caldara Con Miguel Martino. Une chanson composĂ©e par Enrique Juan MunnĂ© avec des paroles de Lina Ferro de Bahr) parlant de James Dean, cet acteur mort en 1955 Ă  l’ñge de 24 ans dans un accident de voiture.
La fulana (milonga) 1957-07-29 — Jorge Caldara Con Carlos Montalvo avec des paroles et la musique de Alberto Mastra et Luis Rafael Caruso.

En parallĂšle, Jorge joue dans un cuarteto. Cette dimension d’orchestre s’adapte mieux Ă  cette Ă©poque oĂč le tango est en perte de vitesse.

La tablada 1960-01-29 Estrellas de Buenos Aires

Un exemple de ce que donne ce cuarteto nommĂ© Las estrellas de Buenos Aires (les Étoiles de Buenos Aires). Dans ce titre, on entend bien sĂ©parĂ©ment les quatre instruments. Vous pouvez donc repĂ©rer par ordre d’apparition : le bandonĂ©on de Jorge, le piano d’Armando Cupo et le violon d’Hugo Baralis puis la contrebasse de Kicho DĂ­az. Vous remarquerez que la version proposĂ©e par ce cuarteto est bien originale et qu’elle valait le coup de lire jusqu’ici.

Et une derniĂšre surprise, un de ses derniers enregistrements

Mais ce n’est pas fini, je reviens Ă  l’orchestre avec qui il a continuĂ© d’enregistrer dans les annĂ©es 60 avec un titre incroyable. C’est une des compositions les plus cĂ©lĂšbres d’Osvaldo Pugliese, ici dans une version fort Ă©tonnante que nous propose Jorge Caldara et son orchestre.

La Yumba 1964 — Jorge Caldara — La Yumba 1964 — Jorge Caldara.

On voit bien que c’est Caldara qui poussait Pugliese, plutît que l’inverse, non ?

On ne peut que regretter que ce talentueux musicien soit mort jeune, sa carriĂšre commencĂ©e Ă  14 ans n’a pas durĂ© 30 ans (26 ans). Les trois/quatre derniĂšres annĂ©es de sa vie furent perdues Ă  cause du cancer qui l’emporta. Ses enregistrements de 1964 sont les derniers.

MelodĂ­a de arrabal (film) – 1933-04-05

Metteur en scÚne : Louis Joseph Gasnier Scénario Alfredo Le Pera.

MelodĂ­a de arrabal, c’est le retour de Carlos Gardel au cinĂ©ma dans un film rĂ©alisĂ© par le rĂ©alisateur français, Louis Joseph Gasnier. Comment un film français, rĂ©alisĂ© en France nous apprend ce qui se passait dans le milieu du tango argentin au dĂ©but du vingtiĂšme siĂšcle.

Bien sĂ»r, ce film n’est pas un documentaire et on pourrait considĂ©rer qu’il exploite des clichĂ©s sur le tango portĂšgne. Cependant, ces mĂȘmes clichĂ©s sont ceux qui nourrissent les paroles et l’imaginaire des tangos, imaginaire oĂč des jeunes gens un peu hĂąbleurs et bagarreurs, sĂ©duisent de belles ingĂ©nues, ingĂ©nues qui se rĂ©vĂšlent avoir du caractĂšre ou d’autres aspirations.
À ceux qui peuvent s’étonner qu’un film sur Buenos Aires soit tournĂ© Ă  Paris, avec des acteurs Argentins ou Espagnols par une sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine (Paramount), je rĂ©pondrai que c’est une preuve de l’internationalisation rapide du tango.
Je vous propose aujourd’hui quelques Ă©lĂ©ments de la romance de Buenos Aires autour de ce film sorti au cinĂ©ma le 5 avril 1933, il y a exactement 91 ans.

Les acteurs

Carlos Gardel (Roberto RamĂ­rez), Imperio Argentina (Alina), Vicente Padula (GutiĂ©rrez), Jaime Devesa (Rancales, le truand), Helena D’Algy (Marga), Felipe Sassone (Empresario), Manuel ParĂ­s (Maldonado), JosĂ© ArgĂŒelles (JuliĂĄn), Josita HernĂĄn.

Carlos Gardel et Imperio Argentino Ă  l’Ă©poque du tournage du film (fin 1932).

L’intrigue

Roberto Ramírez interprété par Carlos Gardel est un vaurien qui vit dans les cafés de la banlieue de Buenos Aires. Il est tricheur et se pique de chanter le tango.
Alina (jouĂ©e par Imperio Argentina) qui est professeur de chant l’entend chanter et lui conseille de se lancer dans le mĂ©tier.
Roberto RamĂ­rez (Gardel) dĂ©cide de suivre ses conseils et d’amĂ©liorer sa vie. Malheureusement, il tue accidentellement un truand qui menaçait de dĂ©voiler ses mauvais penchants Ă  Alina qui croit que c’est un brave gars (ce qui n’est pas faux).
Si on passe les pĂ©ripĂ©ties de l’enquĂȘte policiĂšre (dont le rebondissement final est amusant), on notera qu’Alina cherche Ă  faire entendre Roberto, son protĂ©gĂ© Ă  un producteur jouĂ© par Felipe Sassone.
Ce n’est pas si facile, car Gardel ne souhaite pas se dĂ©voiler en public, mais le producteur sous le charme d’Alina accepte d’écouter Gardel dans une soirĂ©e privĂ©e chez lui.
Lors de cette soirée, le producteur fait chanter Alina, puis celle-ci enjoint à Gardel de chanter.
Si on me permet cette audace, c’est aussi lors de cette soirĂ©e que le truand Rancales essaye Ă©galement de faire chanter Gardel, mais d’une autre façon et qu’il terminera mort dans une scĂšne Ă  la Agatha Christie.
C’est un succĂšs, le producteur fait venir Gardel, pardon, Roberto dans son thĂ©Ăątre et l’y fait chanter.
C’est là qu’il va chanter Silencio avec beaucoup de succùs. C’est nettement le temps fort du film. On comprendra pourquoi en lisant ma notice sur Silencio

La version du film que je propose enchaĂźne de façon Ă©trange sur MelodĂ­a de arrabal. Est-ce le mĂȘme jour, pas sĂ»r. Les ellipses dans ce film sont moyennes. Par exemple, quand Rancales, le truand jouĂ© par Jaime Devesa sort de prison, on risque de ne pas capter qu’il s’est passĂ© un an. Un an sans voir Alina qui lui avait proposĂ© de l’aider Ă  chanter. On le sait uniquement par un dialogue de Gardel un peu plus tard. Dans le cas prĂ©sent, je pense que le changement de costume est censĂ© nous renseigner.
Le film se termine en parfait retour arriĂšre avec le dĂ©but du film avec le disque 78 tours de Roberto (MelodĂ­a de arrabal) tournant sur un gramophone et la camĂ©ra qui se lance dans un long traveling arriĂšre symĂ©trique du traveling du dĂ©but. On voit les badauds s’agglutiner Ă  la devanture du magasin de disque. Le mot « fin » apparaĂźt sur le sol. Gardel, pardon Roberto est devenu chanteur de tango


Quelques points de repĂšre et moments forts du film

Cliquez sur les vidĂ©os, vous irez directement au moment sĂ©lectionnĂ©. Ne vous fiez pas Ă  l’image qui est toujours la mĂȘme, vous irez bien au point indiquĂ© en cliquant sur l’image.

Pour voir le film en entier dans YouTube, cliquez sur ce lien.

Le film commence aprùs un panoramique sur un long traveling avant qui suit Carlos Gardel (Roberto) jusqu’à un magasin de disques.
Quelques personnes sont autour d’un phonographe qui passe une version instrumentale de MelodĂ­a de arrabal. Gardel qui est entrĂ© y rencontre Imperia (Alina). Il lui propose de lui offrir le disque. Celle-ci refuse, mais Roberto lui promet de lui chanter Ă  chaque fois qu’il la croisera.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=47
3 : 08 pour voir un peu de danse et l’ambiance reconstituĂ© dans un studio de la rĂ©gion parisienne des lieux portĂšgnes du dĂ©but du vingtiĂšme siĂšcle.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=188
37 : 15 No sĂ© porquĂ©, une habanera chantĂ©e par Imperio Argentina et Carlos Gardel en Duo. Une perle ! JosĂ© Sentis, l’auteur des paroles et de la musique Ă©tait un pianiste et compositeur nĂ© en Espagne. Il fut un des pionniers du tango Ă  Paris. Ce titre tĂ©moigne de ses origines.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=2234
46:28 Le barman utilise un shaker comme des maracas, les danseurs dansent Jazz. N’oublions pas que les bals de l’époque Ă©taient mixtes, tango et jazz. Continuez de regarder pour voir les gens danser et voir la fin de la danse quand
 Ă  47 : 10, le maĂźtre de maison (le producteur) arrĂȘte la musique sur laquelle les gens dansaient pour annoncer l’intermĂšde. On voit donc un bal privĂ© utilisant des disques. À la suite chante donc Imperio Argentina qui s’accompagne au piano.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=2788
50 : 09 Cuando tĂș no estĂĄs, une chanson chantĂ©e par Carlos Gardel accompagnĂ© au piano par Imperio Argentina. (Carlos Gardel et Marcel LattĂ©s pour la musique et Alfredo Le Pera et Mario Battistella pour les paroles).
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=3006
1 :11 :15 Silencio, par Carlos Gardel (Musique Carlos Gardel et Horacio G. Pettorossi, paroles Alfredo Le Pera et Horacio G. Pettorossi). Nous avons prĂ©sentĂ© ce merveilleux titre dans une anecdote du jour Silencio. Remarquez Ă  l’arriĂšre-plan la Orquesta tĂ­pica Argentina de Juan Cruz Mateo.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=4256
1 :15 :07 Melodía de arrabal, par Carlos Gardel (Carlos Gardel pour la musique et Alfredo Le Pera et Mario Battistella pour les paroles).
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=4502
Reprise finale, pour la troisiĂšme fois de MelodĂ­a de arrabal, cette fois sur le disque qu’il a enregistrĂ©. C’est la fin du film.
https://youtu.be/VIiBfGUavoA?t=4872

Quelques affiches et pochettes de DVD


Vous pouvez les regarder en écoutant, deux versions trÚs différentes.

MelodĂ­a de arrabal 1933-04-17 – Orquesta Francisco Canaro con Ernesto FamĂĄ. Canaro, comme il l’avait fait pour Silencio, publie “la musique du film” dans sa version. Un bon marketing, c’est toujours utile, non ? En plus, c’est une version de danse, alors, on ne va pas bouder son plaisir.
MelodĂ­a de arrabal 1965 – Orquesta Miguel CalĂł con RaĂșl del Mar y glosas de HĂ©ctor Gagliardi J’aime bien la glose initiale. Et cette version est sympathique.

Pasado florido 1945-04-04 — Orquesta Ricardo Malerba con Antonio Maida

Rosendo Luna (Enrique Domingo CadĂ­camo) paroles et musique

Aujourd’hui, un tango un peu rare, car il n’a Ă©tĂ© enregistrĂ© qu’une fois et par un orchestre peu passĂ© en milonga, avec un chanteur encore plus rare. En revanche, les paroles et la musique sont par le fameux Rosendo Luna (Enrique Domingo CadĂ­camo). Elles parlent du Buenos Aires disparu et de quelques souvenirs qu’il peut ĂȘtre intĂ©ressant de rĂ©viser


Extrait musical

Pasado florido 1945-04-04 — Orquesta Ricardo Malerba con Antonio Maida

Les paroles

Buenos Aires, has cambiado como yo cambié de a poco.
Soy del tiempo de tus focos, los primeros que hubo a gas.
Yo bailé en Rodríguez Peña, con la orquesta de los Greco
y hasta aquí me llega el eco y me enciende su compás


Yo me acuerdo del T.V.O., de la calle Montes de Oca,
de un café que había en La Boca, donde Arolas empezó.
Y de Andrade, buen amigo, que en un baile lo mataron

ÂĄEsas cosas ya pasaron pero tienen su emociĂłn!

De aquel pasado florido
de mil novecientos once,
viene el recuerdo querido
en ancas de aquel entonces

La noche cuando Manolo
me provocĂł con los Vieyra
y como yo estaba solo
no quise hacerme el Moreyra.
Si hubiese vivido Andrade no queda ni uno, esa vez.

CuĂĄntas noches nos largamos con Cielito y con Ceballos
en los coches de caballos, por tus calles a pasear

Y una vez, cuando entre copas, por hacer un chiste de antes
fui a sentarme en el pescante y me puse a manejar

Buenos Aires de Fray Mocho y de Caras y Caretas
en tus plazas sin retretas, hoy me pongo a suspirar

Y al mirar como has cambiado, mi Buenos Aires querido
por aquello que he vivido, siento ganas de llorar.

Rosendo Luna (Enrique Domingo CadĂ­camo) paroles et musique

Traduction libre et indications

Buenos Aires, tu as changĂ© comme j’ai changĂ©, peu Ă  peu.
Je suis de l’époque des rĂ©verbĂšres, les premiers qui Ă©taient au gaz.
J’ai dansĂ© Ă  RodrĂ­guez Peña,

avec l’orchestre Greco (Vicente Greco dit Garrote, BandonĂ©iste, chef d’orchestre et compositeur. 1888-1924).
Et c’est aussi loin que l’écho m’atteint et tourne sur son rythme

Je me souviens du T.V.O., rue Montes de Oca, (Un tango de Adela del Valle [1897-19 ??] se nomme ainsi, sans doute en souvenir du mĂȘme Ă©tablissement. T.V.O. = Te veo [je te vois]. La rue Montes de Oca Ă©tait dans le quartier Ă  l’époque chic de Buenos Aires, Barracas. C’est encore quelque chose qui a changĂ©, Barracas ayant une mauvaise rĂ©putation aujourd’hui).

T.V.O (TĂ© Veo) — Adela del Valle

d’un cafĂ© de La Boca, oĂč Arolas a fait ses dĂ©buts.

(On a vu à propose de Lorenzo que le Tigre du bandonéon [Arolas] rodait du cÎté du Café Royal, plus connu sous son surnom de Café del Griego).

Et Andrade, un bon ami, qu’ils ont tuĂ© dans un bal
 (Il n’est pas le seul
 Peut-ĂȘtre un BrĂ©silien).  
Ces choses-lĂ  c’est du passĂ©, mais elles ont leurs Ă©motions !
De ce passĂ© fleuri de mil neuf cent onze, le cher souvenir vient sur le dos (du cheval) de l’époque

La nuit oĂč Manolo (les paroles Ă©crites en 1983 par Pedro Colombo pour le tango « Manolo » semblent conter cette histoire) m’a provoquĂ© avec les Vieyras
Et comme j’étais seul, je ne voulais pas jouer le Moreyra.
Si Andrade avait vĂ©cu, il n’en serait pas restĂ© un seul, cette fois-lĂ . (beaucoup de candidats possibles, je n’arrive pas Ă  la dĂ©partager).
Combien de nuits sommes-nous partis avec Cielito et Ceballos dans des voitures Ă  chevaux, nous promener dans tes rues…
Et une fois, entre deux verres, pour faire une blague d’antan, je suis allĂ© m’asseoir sur le siĂšge et j’ai commencĂ© Ă  conduire

Buenos Aires de Fray Mocho (JosĂ© Ciriaco Alvarez [1858 –1903] Ă©crivain et journaliste)

et Caras y Caretas (Revue fort intĂ©ressante et qui malgrĂ© quelques Ă©clipses, continue d’ĂȘtre publiĂ©e aujourd’hui) vos places sans spectacles de rue, aujourd’hui je commence Ă  soupirer

Et en voyant Ă  quel point tu as changĂ©, mon Buenos Aires bien-aimĂ©, Ă  cause de ce que j’ai vĂ©cu, j’ai envie de pleurer.

Rosendo Luna (Enrique Domingo CadĂ­camo)

Cadicamo, (Rosenda Luna ou Yino Luzzi) a vécu tout le vingtiÚme siÚcle. Du 15 juillet 1900 au 3 décembre 1999).
Il a composĂ© et/ou Ă©crit les paroles de plus de 800 titres, majoritairement des tangos, mais aussi d’autres rythmes
Quelques exemples parmi le plus connus :
A mĂ­ no me hablen de penas Tango (1940)
A otra cosa che pebeta Tango
A pan y agua Tango
A quién le puede importar Tango
AdiĂłs [d] Poema lunfardo
AdiĂłs Arolas (Se llamaba Eduardo Arolas) Tango (1949)
AdiĂłs Chantecler Tango
Al mundo le falta un tornillo Tango (1933)
Almita herida Tango
Anclao en ParĂ­s Tango (1931)
Angel Vargas el ruiseñor Tango
ApologĂ­a tanguera Milonga (1933)
Aquellos tiempos Tango
Araca llegĂł Novarro Tango
Argañaraz (Aquellas farras) Tango (1930)
Ave de paso Tango (1937)
Bailongo Tango
Bandera baja-Ella se reĂ­a Milonga
Baquiano pa’ elegir Tango (1930)
Baraja de amor Tango
Barajando recuerdos Tango
BerretĂ­n Tango (1928)
Bichitos de luz Tango
Boedo y San Juan Tango
Boleta Tango
Brindemos compañero Tango
Brumas Tango
Cabaret Tango
Café de Barracas (No) Tango
Café Nacional Poema lunfardo
Calandria (DejĂĄ el bodegĂłn) Tango
Callejera Tango (1929)
CambiĂĄ de vida Tango (1938)
CanciĂłn del inmigrante Tango
Cancionera Tango
Carnavales de mi vida (Mosca muerta) Tango
Carpeta Tango
Charmaine Vals
Che Bartolo Tango (1928)
Che papusa oĂ­ Tango (1927)
CherĂ­ CanciĂłn
Cien años Canción
Colombina (Teresita) Tango
Como un sueño Tango
CompadrĂłn Tango (1927)
Copas, amigas y besos Tango (1944)
Cortando camino Vals (1941)
Cruz de palo Tango (1929)
CuĂĄl de los dos Tango
Cuando miran tus ojos Vals
Cuando tallan los recuerdos Tango (1943)
Cumplido Tango
De todo te olvidas (Cabeza de novia) Tango (1929)
Descarte Milonga
Desvelo (De flor en flor) Tango (1938)
Dice un refrĂĄn Tango (1942)
Dolor milonguero Tango
Dos en uno Tango
El bar de Rosendo Tango
El beso aquel Tango
El cantor de Buenos Aires Tango (1936)
El cuarteador Tango (1941)
El llorĂłn Tango
El Morocho y el Oriental (Gardel-Razzano) Milonga (1946)
El que atrasĂł el reloj Tango (1933)
El teléfono Tango (1963)
El trompito Tango
Ella se reĂ­a Poema lunfardo
En la buena y en la mala Tango (1940)
En lo de Laura Milonga
En un pueblito de España Vals
En una petite garçoniere de Montmarte Tango
Ensueños Tango
EstaciĂłn Tango Tango
Estrella fugaz Vals
FanfarrĂłn Tango (1928)
Gallo Viejo Tango
GarĂșa Tango (1943)
GigolĂł compadrito Tango
GotĂĄn Tango
Guapo de la guardia vieja Tango
Guitarra que llora Tango
Hambre Tango (1932)
Hermano tordo Poema (1982)
Hojarasca Tango
Hoy es tarde Tango
Humo Tango
Igual que una sombra Tango (1946)
Improvisando Milonga
Intervalo Tango
Juana Rebenque Tango
La barranca Tango
La biaba de un beso Tango
La calle sin sueño Tango
La casita de mis viejos Tango (1932)
La divina dama Vals
La epopeya del tango Poema
La luz de un fĂłsforo Tango (1943)
La novia ausente Tango (1933)
La reina del tango Tango (1928)
Lagrimitas de mi corazĂłn Vals
Llora vida mĂ­a Tango
Llorar por una mujer Tango
Los compadritos Tango
Los mareados Tango (1942)
Luna de arrabal Vals (1934)
Madame Ivonne Tango (1933)
Mal de ausencia [b] Vals
Mano brava Milonga (1941)
Mañanitas de mi Pampa Tango (1953)
MarĂ­a [b] Polca
MarĂ­a Milonga Milonga
Mascarita [c] Vals (1946)
MelodĂ­a oriental Tango
Mi chiquita Tango (1963)
Mi traje de novia Tango
Mi vida [b] Vals (1934)
Mientras gime el bandoneĂłn Tango
Mis lĂĄgrimas Tango
Mocito rana Tango
Mojarrita Tango
Morenita mĂ­a Tango
Muñeca brava Tango (1929)
Muñeca cruel Tango
Naipe Tango (1944)
Niebla del Riachuelo Tango (1937)
No hay tierra como la mĂ­a Milonga
No me importa su amor Tango
No vendrĂĄ Tango (1945)
Noche de estrellas Vals
Noches blancas Vals
Norma Poema lunfardo
Nostalgias Tango (1936)
Notas de bandoneĂłn Tango
Nunca tuvo novio Tango (1930)
Olvidao Tango (1932)
Orgullo tanguero Tango
Orquesta TĂ­pica Tango
Pa’ mĂ­ es igual Tango (1932)
Pa’ que bailen los muchachos Tango (1942)
Palais de Glace Tango (1944)
Pasado florido Tango
Pebeta graciosa Tango
Perdoname Vals
Piano alemĂĄn Fox charleston
Picaneao Tango (1953)
Pico de oro Tango
Piropos Tango
Pituca Tango (1930)
Pobre piba Tango (1941)
Pocas palabras Tango (1941)
Pompas de jabĂłn Tango (1925)
Por la vuelta Tango (1937)
Por las calles de la vida Tango (1942)
Por un beso de amor (Per un bacio d’amor) Vals
Punto alto Tango
Que te vaya bien Tango
Qué torcido andås Juliån Tango
Quién dijo miedo Tango (1932)
Quién te ve Tango
Ramona [CadĂ­camo] Vals
Rondando tu esquina Tango (1945)
Roñita Tango
RubĂ­ Tango (1944)
Salomé Tango
SalĂș percantinas Tango
Santa milonguita Tango (1933)
Se fue la pobre viejita Tango
Se han sentado las carretas Tango
Sea breve Tango
Sentimiento malevo Tango (1929)
Shusheta Tango (1944) (El aristrocrato)
Si la llegaran a ver Tango
Sin hilo en el carretel Tango
Sol de medianoche Tango
Sollozo de bandoneĂłn Tango
Solo de bandoneĂłn Tango
Son cosas del bandoneĂłn Tango
Suburbio Tango
Tango de ayer Tango
Tango de lengue Tango
Te podés acomodar (Zorro viejo) Tango
Tengo mil novias Vals
TradiciĂłn Tango
Tres amigos Tango (1944)
Tres esquinas Tango (1941)
Trovador mazorquero Vals
Tu llamado Tango
Un dilema Tango
Una madre Tango
Vamos zaino Tango
Vas muerto con el disfraz Tango (1930)
VenĂ­ venĂ­ Tango
Vieja recova Tango (1930)
Viejas alegrĂ­as Tango (1937)
Viejo grata Tango
Viejo patio Tango
Villa Urquiza Tango
Voy pa’viejo Tango
Y aquel cariño se fue Tango (1939)
Y qué mås Tango (1937)
Yo nacĂ­ para ti tu serĂĄs para mĂ­ Foxtrot
Yo tan sólo veinte años tenía Vals
Yo te perdono Tango (1927)
Zorro plateao Tango (1942)

Un placer 1936-04-03 — Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral

Vicente Romeo Letra : Juan AndrĂ©s Caruso

Aujourd’hui, une valse pour dĂ©clarer son amour Ă  une jolie femme. Pour cela, quatre hommes se sont attelĂ©s Ă  la tĂąche, Vicente Romeo, Juan AndrĂ©s Caruso, Juan d’Arienzo et Walter Cabral. Nous appellerons Ă©galement Ă  la rescousse, d’autres grands du tango pour vous donner les arguments nĂ©cessaires pour sĂ©duire une femme papillon.

Avec D’Arienzo à la baguette et Biagi, on a l’assurance d’avoir une valse dansable.
En, ce qui concerne le chanteur, Walter Obdulio Cabral (27/10/1917 – 1993), celui collaborera un peu plus d’un an avec D’Arienzo, le temps d’enregistrer trois valses : Un Placer, Tu Olvido et Irene et une milonga orpheline Silueta Porteña.

Extrait musical

Un placer 1936-04-03 — Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral.

Je vous laisse l’Ă©couter. On en reparlera en comparaison avec les autres versions de ce titre.

Les paroles

Linda mariposa
tĂș eres mi alegrĂ­a
y tus colores de rosa
te hacen tan hermosa
que en el alma mĂ­a
tu imagen quedĂł.

Por eso a tu reja
hoy vengo a cantarte,
para decirte, mi diosa,
que eres muy hermosa
y no puedo olvidarte
que antes de dejarte
prefiero la muerte
que sĂłlo con verte
es para mĂ­ un placer.

Sin tu amor ya no puedo vivir.
ÂĄOh! ven pronto no me hagas penar.
De tus labios yo quiero sentir
el placer que se siente al besar.
Y por eso en mi canto te ruego
que apagues el fuego
que hay dentro de mĂ­.

Oye amada mĂ­a
tuyo es mi querer,
que tuya es el alma mĂ­a
toda mi poesĂ­a
mis alegres dĂ­as,
hermosa mujer.

Sale a tu ventana
que quiero admirarte.
Sale mi rosa temprana,
hermosa galana,
que yo quiero hablarte
y quiero robarte
tu querer que es santo
porque te amo tanto
que no puedo mĂĄs.

Y si el destino
de ti me separa
nunca podre ser feliz
y antes prefiero morir.
Porque tu cariño
es mi vida entera.
TĂș has de ser la postrera,
la dulce compañera que ayer soñé.

Vicente Romeo Letra : Juan AndrĂ©s Caruso

Traduction libre

Joli papillon, tu es ma joie et tes couleurs de rose te rendent si belle que dans mon ùme ton image est restée.


C’est pourquoi Ă  ta grille, aujourd’hui je viens chanter, pour te dire, ma dĂ©esse, que tu es trĂšs belle, que je ne peux pas t’oublier et que plutĂŽt que de te quitter je prĂ©fĂšre la mort. Que rien que te voir est un plaisir pour moi.

Sans ton amour, je ne peux pas vivre. Oh ! Viens vite, ne me fais pas de peine. De tes lĂšvres, je veux sentir le plaisir que l’on ressent en embrassant et c’est pourquoi dans ma chanson je te supplie que tu Ă©teignes le feu qu’il y a en moi.

Entend ma bien-aimĂ©e, que tu es mon dĂ©sir, mon Ăąme est tienne, toute ma poĂ©sie, mes jours heureux ; merveilleuse femme.

Sort Ă  ta fenĂȘtre que je veux t’admirer. Sors ma rose prĂ©coce, belle galante, car je veux te parler et te voler ton amour qui est saint parce que je t’aime tant que je n’en peux plus.

Et si le destin me sĂ©parait de toi, je ne pourrais jamais ĂȘtre heureux et prĂ©fĂ©rerais mourir. Parce que ta tendresse est toute ma vie. Tu seras la derniĂšre, la douce compagne dont j’ai rĂȘvĂ© hier.

Autres versions

Un placer 1931-04-23 — Orquesta Juan Maglio Pacho.

Un tempo trĂšs lent, qui peut dĂ©stabiliser certains danseurs. C’est une version instrumentale, avec sans doute un peu de monotonie malgrĂ© des variations de rythme. Pour ma part, j’éviterai de la proposer Ă  mes danseurs.

Un placer 1933-04-11 — Orquesta Típica Los Provincianos (dir. Ciriaco Ortiz) con Carlos Lafuente.

Avec la voix un peu aigre de Carlos Lafuente, mais un joli orchestre pour une valse entraĂźnante. La fin donne l’impression d’accĂ©lĂ©ration, ce qui ravit en gĂ©nĂ©ral les danseurs, surtout en fin de tanda. On est clairement montĂ© d’un cran dans le plaisir de la danse avec cette version. L’orchestre est Los provincianos, mais il s’agit d’un orchestre Victor dirigĂ© par Ciriaco Ortiz. Ce qui fait que vous pouvez trouver le mĂȘme enregistrement sous les trois formes : Los Provincianos, TĂ­pica Victor ou Ciriaco Ortiz, voire un mixage des trois, mais tout cela se rĂ©fĂšre Ă  cet enregistrement du 11 avril 1933.

Un placer 1936-04-03 — Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral. C’est le tango du jour.

La voix de Walter Cabral rappelle celle de Carlos Lafuente, une voix de tĂ©nor un peu nasillarde, mais comme dans le cas de Lafuente, ce n’est pas si gĂȘnant, car ce n’est que pour une petite partie de la valse. L’impression d’accĂ©lĂ©ration ressentie avec la version de Ciriaco Ortiz est prĂ©sente, mais c’est une constante chez d’Arienzo. BIagi qui a intĂ©grĂ© l’orchestre il y a cinq mois est relativement discret. Il se dĂ©tache sur quelques ponctuations lĂąchĂ©es sur les temps de respiration de l’orchestre. Il n’a pas encore complĂštement trouvĂ© sa place, place qui lui coĂ»tera la sienne deux ans plus tard


Un placer 1942-06-12 — Orquesta Aníbal Troilo.

Ici pas de voix aigre ou nasillarde, les parties sont chantĂ©es par les violons, ou par le chƓur des instruments, avec bien sĂ»r le dernier mot au bandonĂ©on de Troilo qui termine divinement cette version Ă©lĂ©gante et dansante.

Un placer 1949-02 — Francisco Lauro con su Sexteto Los Mendocinos y Argentino Olivier.

Une version un peu faible Ă  mon goĂ»t. Le sexteto manque de prĂ©sence et Argentino Olivier, dĂ©roule les paroles, sans provoquer une Ă©motion irrĂ©pressible. Une version que je ne recommanderai pas, mais qui a son intĂ©rĂȘt historique et qui aprĂšs tout peut avoir ses fanatiques.

Un placer 1949-08-04 — Orquesta JosĂ© Basso con Francisco Fiorentino y Ricardo Ruiz.

Une version trĂšs jolie, avec piano, violons et bandonĂ©ons expressifs. L’originalitĂ© est la prestation en Duo, de deux magnifiques chanteurs, Francisco Fiorentino y Ricardo Ruiz. On peut ressentir un lĂ©ger Ă©tonnement en Ă©coutant les paroles, les deux semblent se rĂ©pondre. C’est une jolie version, mais peut-ĂȘtre pas la premiĂšre Ă  proposer en milonga.

Un placer 1954 — Cuarteto Troilo-Grela.

Une magnifique version dans le dialogue entre le bandonĂ©on et la guitare. La musique est riche en nuances. Le bandonĂ©on dĂ©marre tristement, puis la guitare donne le rythme de la valse et le bandonĂ©on alternent des moments oĂč les notes sont piquĂ©es Ă  la main droite, et d’autres oĂč le plein jeu de la main gauche donne du corps Ă  sa musique. À 1 : 30 et 1 : 50, Ă  2 : 02, le bandonĂ©on s’estompe, comme s’il s’éloignait. À 2 : 10, la rĂ©verbĂ©ration du bandonĂ©on peut ĂȘtre causĂ©e par un Ă©loignement physique important du bandonĂ©on par rapport au microphone, ou bien Ă  un ajout ponctuel de rĂ©verbĂ©ration sur ce passage. Je ne suis pas sĂ»r que cet artifice provoquĂ© par l’enregistrement apporte beaucoup au jeu de Troilo. Il faut toutefois pardonner Ă  l’ingĂ©nieur du son de l’époque. C’est le dĂ©but d’une nouvelle Ăšre technique et il a sans doute eu envie de jouer avec les boutons


Un placer 1958-10-07 — Orquesta JosĂ© Basso con Alfredo Belusi y Floreal Ruiz.

JosĂ© Basso refait le coup du duo, mais cette fois avec Alfredo Belusi et Ricardo Ruiz. À mon avis, cela fonctionne moins bien que la version de 1949.

Un placer 1979 — Sexteto Mayor.

Pour terminer, une version assez originale, dĂšs l’introduction. Je vous laisse la dĂ©couvrir. Étant limitĂ© Ă  1 Mo par morceau sur le site, vous ne pouvez pas entendre la stĂ©rĂ©o vraiment exagĂ©rĂ©e de ce morceau, car tous les titres sont passĂ©s en basse qualitĂ© et en mono pour tenir dans la limite de 1 Mo. C’est une peine pour moi, car la musique que j’utilise en milonga demande entre 30 et 60 Mo par morceau
 Sur la stĂ©rĂ©o en milonga, c’est Ă  limiter, surtout avec des titres comme celui-ci, car les danseurs auraient d’un cĂŽtĂ© de la salle un instrument et de l’autre un autre. Donc, si j’ai un titre de ce type Ă  passer (c’est frĂ©quent dans les dĂ©mos), je limite l’effet stĂ©rĂ©o en rĂ©glant le panoramique proche du centre. Une salle de bal n’est pas un auditorium


Mini tanda en cadeau

Cabral n’a enregistrĂ© que trois valses avec D’Arienzo. Je vous propose d’écouter et surtout danser cette mini tanda de seulement trois titres. Peut-ĂȘtre apprĂ©cierez-vous Ă  la fin de la tanda la voix un peu surprenante de Cabral.

Cerise sur la tanda. Pardon, le gĂąteau, les trois titres forment une histoire. Il dĂ©couvre son amour, elle s’appelle Irene et
 Ça se termine mal


Un placer 1936-04-03 — Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral. C’est le tango du jour.
Irene 1936-06-09 – Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral
Tu olvido 1936-05-08 — Orquesta Juan D’Arienzo con Walter Cabral

Vida y obra de Walter Cabral

Vous pourrez trouver sur ce site, une biographie complĂšte de ce chanteur.

El adiós 1938-04-02 – Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos

Maruja Pacheco Huergo (MarĂ­a Esther Pacheco Huergo) Letra: Virgilio San Clemente

Plus de 200 tangos ont dans leur titre le mot « Adios ». C’est donc un thĂšme fort du tango, mais la composition Ă©crite par Maruja Pacheco Huergo est de loin la plus cĂ©lĂšbre. Je vous propose, la version qui est considĂ©rĂ©e comme la plus belle, celle de Donato avec Lagos qui fĂȘte aujourd’hui ses 86 ans.

Il y a adiĂłs et adiĂłs

Il y a environ 200 tangos avec adiĂłs dans le titre dont on a au moins un enregistrement et il faut rajouter une dizaine de valses et mĂȘme une milonga.
Cependant, tous les adiĂłs ne sont pas similaires.
Contrairement au français, adiĂłs n’a pas la connotation dĂ©finitive de l’adieu. En français, on dit surtout Adieu quand on ne compte plus se revoir, ou seulement en prĂ©sence de Dieu (À Dieu), aprĂšs la rĂ©surrection.
Pour les Argentins, ce n’est pas le cas. C’est un synonyme complet d’au revoir et il s’emploie donc de la mĂȘme façon. Un Argentin qui vous dit adieu a l’intention de vous revoir, il vous recommande juste « à Dieu », c’est-Ă -dire qu’il vous souhaite d’aller bien pendant le temps de la sĂ©paration.
Cependant, en Argentine Ă©galement, le terme adiĂłs a une signification dĂ©finitive. On l’utilise Ă©galement pour quitter un dĂ©funt, tout comme en France.
Dans le petit monde du tango, il est frĂ©quent que l’on honore un dĂ©funt en lui faisant un adieu musical. Parmi les titres cĂ©lĂšbres dans ce sens, on a A Magaldi, cette valse d’adieu Ă  AgustĂ­n Magaldi, composĂ©e par Carlos Dante et Pedro Noda et dont les paroles sont de Juan Bernardo Tiggi. On connaĂźt les merveilleuses versions chantĂ©es justement par Carlos Dante, notamment celle de 1947, 9 ans aprĂšs la mort d’AgustĂ­n qui lui-mĂȘme avait chantĂ© pour la mort de Gardel peu d’annĂ©es auparavant. Nous en reparlerons le 21 octobre


Note : El adiĂłs, porte un S Ă  la fin, car c’est « À Dieu » (adieu), Dieu se dit « DiĂłs » en espagnol, ce n’est pas un S du pluriel. Comme DJ, combien de fois ai-je entendu nommer ce titre « El adio » 

Maruja Pacheco Huergo

Maruja (MarĂ­a Esther) Pacheco Huergo (3 avril 1916 – 2 septembre 1983) Ă©tait pianiste, compositrice et paroliĂšre, mais Ă©galement auteure (notamment de poĂšmes et scĂ©narios), actrice et professeur de musique et de chant.
Elle a composĂ© plus de 600 thĂšmes, pas tous des tangos, mais parmi ses crĂ©ations dont nous avons une trace enregistrĂ©e dans notre domaine qu’est le tango, on pourrait citer les titres suivants :

Comme auteure et compositrice :

SinfonĂ­a de arrabal, (paroles et musique) cĂ©lĂšbre par le mĂȘme chef d’orchestre que El Adios, notre tango du jour avec le trio enchanteur de Horacio Lagos, Lita Morales et Romeo Gavioli.
Cuando silba el viento une habanera dont elle a Ă©galement Ă©crit, paroles et musique.
LejanĂ­a (une chanson qu’a chantĂ©e Corsini), Oro y Azul, El Silencio, Con sabor a tierra, Nenucha et environ 500 autres titres que vous me pardonnerez de ne pas lister ici, mais ce ne sont pas non plus des tangos.

Comme compositrice

Canto de ausencia mise en musique d’un texte d’Homero Manzi
Don Naides avec des paroles de Venancio Clauso
Gardenias avec des paroles de Manuel Enrique FerradĂĄs Campos (son mari)
Milonga del aguatero et Cancionero porteño del siglo XIX avec des paroles d’Eros Nicola Siri

Comme paroliĂšre

Sur des musiques de Donato, elle a Ă©crit les paroles d’Alas rotas, Para quĂ©, LĂĄgrimas et Triqui tra.
Ses 600 compositions lui valent d’ĂȘtre inhumĂ©e au panthĂ©on SADAIC (sociĂ©tĂ© des auteurs et compositeurs argentins) du cimetiĂšre de la Chacarita (Buenos Aires).

Virgilio San Clemente

Virgilio San Clemente est surtout un poĂšte. On lui doit cependant les paroles de El adios, et de quelques autres titres, comme la jolie valse Viejo jardĂ­n et sans doute Dulce amargura (mais il y a un doute, car il est mentionnĂ© tantĂŽt comme compositeur ou comme parolier). Comme il m’est impossible de dĂ©partager les deux possibilitĂ©s, voici oĂč j’en suis de l’investigation


Sur le disque de gauche, Fresedo (1938), Virgilio San Clemente est indiquĂ© comme compositeur. Sur celui du milieu, Nano Rodrigo (1940), ce sont Torres et Alperi et sur celui de droite qui est une rĂ©Ă©dition en vinyle de l’enregistrement de 1938 de Corsini, il y a bien les trois noms, mais sans distinction de fonction.
En rĂ©sumĂ©, si Virgilio Ă©tait poĂšte, il a peut-ĂȘtre composĂ© un tango et Ă  assurĂ©ment Ă©crit les paroles d’autres.
Torres et Alperi ne sont pas des compositeurs connus, on ne peut pas lever le doute sur la composition de ce titre tant que l’on n’a pas la partition originale que je n’ai pas encore trouvĂ©e.
En attendant, je penche plutĂŽt du cĂŽtĂ© oĂč San Clemente s’est cantonnĂ© aux paroles pour Dulce Amargura. Les deux Ɠuvres sont Ă©crites de façon comparable, en trois parties et avec des rimes approximatives, mais devinables. Viejo jardĂ­n est diffĂ©rent, il y a plus de couplets, mais les rimes sont Ă©galement trĂšs approximatives. Ces indices, trĂšs lĂ©gers n’invalident pas la possibilitĂ© qu’il soit l’auteur des trois textes.

Extrait musical

El adiós 1938-04-02 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos.

Les cordes sont trĂšs prĂ©sentes dans cette version, en legati des violons et en pizzicati. Quelques accents des bandonĂ©ons. Le piano chante Ă©galement sa partie Ă  tour de rĂŽle jusqu’à Ă  1 :42 entre en scĂšne Lagos qui ne chante que trĂšs briĂšvement, seulement le premier couplet. Il explique le thĂšme et laisse la parole aux instruments pour les 55 derniĂšres secondes.

Les paroles

En la tarde que en sombras se morĂ­a,
buenamente nos dimos el adiós ;
mi tristeza profunda no veĂ­as
y al marcharte sonreĂ­amos los dos.
Y la desolaciĂłn, mirĂĄndote
al partir,
quebraba de emoción mi pobre voz

El sueño mås feliz, moría en el adiós
y el cielo para mĂ­ se obscureciĂł.

En vano el alma
con voz velada
volcó en la noche la pena

SĂłlo un silencio
profundo y grave
lloraba en mi corazĂłn.

Sobre el tiempo transcurrido
vives siempre en mĂ­,
y estos campos que nos vieron
juntos sonreĂ­r
me preguntan si el olvido
me curĂł de ti.
Y entre los vientos
se van mis quejas
muriendo en ecos,
buscándote

mientras que lejos
otros brazos y otros besos
te aprisionan y me dicen
que ya nunca has de volver.

Cuando vuelva a lucir la primavera,
y los campos se pinten de color,
otra vez el dolor y los recuerdos
de nostalgias llenarĂĄn mi corazĂłn.
Las aves poblarĂĄn de trinos el lugar
y el cielo volcará su claridad

Pero mi corazĂłn en sombras vivirĂĄ
y el ala del dolor te llamarĂĄ.
En vano el alma
dirĂĄ a la luna
con voz velada la pena

Y habrĂĄ un silencio
profundo y grave
llorando en mi corazĂłn.

Maruja Pacheco Huergo (MarĂ­a Esther Pacheco Huergo) Letra: Virgilio San Clemente

Traduction libre et indications

Dans la soirée qui se meurt en ombres,
Nous nous sommes tout bonnement dit adieu ; (un adieu comme si c’était un au revoir pour elle).
Tu ne voyais pas ma profonde tristesse
Et quand tu es partie, nous sourions tous les deux.
Et la désolation, de te regarder partir,
brisa d’émotion, ma pauvre voix

Le rĂȘve le plus heureux est mort dans l’adieu
Et le ciel pour moi s’est obscurci.
En vain l’ñme
d’une voix voilĂ©e
déversa le chagrin dans la nuit

Juste un silence
profond et grave
pleurait dans mon cƓur.

À propos du temps Ă©coulĂ©,
tu vis toujours en moi,
et ces champs qui nous ont vus
sourire ensemble
me demandent si l’oubli
m’a guĂ©ri de toi.
Et parmi les vents
mes plaintes s’en vont
mourant en Ă©chos
te cherchant

pendant qu’au loin
d’autres bras et d’autres baisers
t’emprisonnent et me disent
que jamais, tu ne reviendras.

Quand le printemps brillera Ă  nouveau,
et que les champs se peindront de couleurs,
encore une fois, la douleur et les souvenirs
rempliront mon cƓur de nostalgie.
Les oiseaux peupleront de trilles l’espace
et le ciel rĂ©pandra sa clarté 
Mais mon cƓur vivra dans l’ombre
et l’aile de la douleur t’appellera.
En vain l’ñme
dira Ă  la lune
d’une voix voilĂ©e, la douleur

et il y aura un silence
profond et grave
Pleurant dans mon cƓur.

Autres versions

El adiós 1938-03-03 — Orquesta Francisco Canaro con Roberto Maida.

Cette version fait jeu Ă©gal avec celle de Donato. Je sais que certains danseurs prĂ©fĂšrent celle de Donato, mais pour moi, il est difficile de les dĂ©partager. Dans un bal, je peux passer indiffĂ©remment l’une ou l’autre, selon l’ambiance que je veux donner. La version de Canaro marche de façon obstinĂ©e, avec de jolis passages de violons ondulants et des moments de piano qui ponctuent. Rien de monotone dans cette version, toujours entraĂźnante.

El adiĂłs 1938-03-15 — Ignacio Corsini con guitarras de PagĂ©s-Pesoa-Maciel.

Avec un accompagnement de guitares, Corsini chante l’intĂ©gralitĂ© des paroles. Corsini a enregistrĂ© 12 jours aprĂšs aprĂšs Canaro, mais il a Ă©tĂ© le premier Ă  jouer le titre, comme en tĂ©moigne la partition.

El adiĂłs 1938 Hugo Del Carril con orquesta.

C’est une version Ă  Ă©couter. La voix d’Hugo Del Carril exprime avec Ă©motion les sentiments du narrateur. C’est Ă  comparer avec l’enregistrement d’Ignacio Corsini de la mĂȘme Ă©poque. La voix de Del Carril pourrait tenir la comparaison avec les versions de Maida et Lagos. L’orchestre est Ă©galement agrĂ©able, on se prend Ă  regretter qu’une version de danse ne soit pas venue complĂ©ter cet enregistrement.

El adiĂłs 1938-04-02 — Orquesta Edgardo Donato con Horacio Lagos. C’est le tango du jour.
El adiós 1954-01-28 – Ángel Vargas con su orguesta dirigida por Armando Lacava.

Pour une version de chanteur, cette interprĂ©tation de Vargas. Donne la part belle Ă  l’orchestre de Lacava. Le thĂšme est chantĂ© par les instruments avec des variations d’intensitĂ©s qui donnent de la structure Ă  la musique. AprĂšs une minute Vargas commence et chante, une minute environ, laissant les 45 derniĂšres Ă  l’orchestre, sauf une courte reprise de la seconde partie du refrain en final. Cette version de chanteur est presque un tango de danse.

El adiós 1963 – Orquesta Osvaldo Pugliese con Jorge Maciel.

Hier, je parlai de Recuerdo. La version de El adiĂłs n’est assurĂ©ment pas un tango conçu pour la danse. C’est musicalement sublime, mĂȘme si la voix de Maciel peut parfois ĂȘtre modĂ©rĂ©ment apprĂ©ciĂ©e. Je sais que beaucoup de danseurs se battront pour le danser sur la piste. Alors, je pourrai le passer, mais il y a tant de belles choses de Pugliese parfaites pour la danse que Maciel ne sera pas une de mes prioritĂ©s, mĂȘme si les danseurs applaudissent souvent (ce qui ne se fait pas Ă  Buenos Aires).

El adiĂłs 1973 – Hugo DĂ­az.

C’est la seule version instrumentale de ma sĂ©lection, mais l’harmonica d’Hugo DĂ­az est comme une voix. Il commence par un cri dĂ©chirant et ensuite semble pleurer. La guitare le rejoint mais avec un tampon imparable, qui s’ajuste parfois aux accents les plus tristes de l’harmonica. Du trĂšs grand Hugo DĂ­az. À priori, ce n’est pas pour la danse, mais cette version est tellement Ă©mouvante qu’elle pourrait participer Ă  une belle tanda particuliĂšre. Il y a une vingtaine d’annĂ©e, une danseuse adorait et lorsque j’animais la milonga, je passais souvent cet artiste quand elle Ă©tait lĂ .
Pour terminer, une version de 2010 par le DĂșo Angelozzi-Cavacini auquel s’est jointe Ivana Fortunati. Cet enregistrement est en hommage Ă  Remo Angelozzi rĂ©cemment dĂ©cĂ©dĂ©. Vous le connaissez sans doute mieux sous son nom d’artiste, RaĂșl AngelĂł quand il Ă©tait, notamment le chanteur de l’orchestre d’Edgardo Donato (en 1953).

El adiĂłs 2010 — DĂșo Angelozzi-Cavacini junto a Ivana Fortunati. Analia Angelozzi et Ivana Fortunati sont accompagnĂ©es par Pablo Cavacini et Jose MorĂĄn Ă  la guitare et par Bocha Luca au bandonĂ©on.

Adiós queridos amigos, hasta mañana.

El apronte 1937-04-01 — Orquesta Juan D’Arienzo

Roberto Firpo

Le post d’hier Ă©tait trĂšs long et touffu. Aujourd’hui, j’ai choisi un tango instrumental et c’est sans doute bien dans la mesure oĂč « El apronte Â» a de multiples significations qui pourraient nous emmener sur des terrains hasardeux. Aujourd’hui, on parlera donc de musique avec la version de D’Arienzo enregistrĂ©e le 1er avril 1937, il y a exactement 87 ans.

La dédicace

Comme cela arrive trĂšs souvent, la partition a un ou des dĂ©dicataires. Ici, ce sont les internes de l’hĂŽpital San Roque de Buenos Aires.

El apronte 1937-04-01 — Orquesta Juan D’Arienzo

Rodolfo Biagi, le pianiste, est dĂ©sormais bien installĂ© dans l’orchestre et a pris (gagnĂ©) plus de libertĂ© pour exprimer ses ornements.
D’Arienzo lui laisse des temps de suspension pendant lesquels les autres instruments se taisent.
Le jeu pour les danseurs est que ces temps de silences ne sont pas tous remplis, ce qui donnera un peu plus tard les fameux breaks de D’Arienzo, ces moments de silence sans musique.
En dehors de ces fioritures, le piano joue au mĂȘme compas (rythme que les autres instruments).
Comme trĂšs souvent chez d’Arienzo, la fin donne une impression d’accĂ©lĂ©ration, mais cela se fait par l’intercalage de notes supplĂ©mentaires, pas par une accĂ©lĂ©ration rĂ©elle du tempo qui reste rĂ©guler durant toute l’interprĂ©tation

Les paroles

C’est un tango instrumental, aussi je n’aborderai pas la question des paroles et c’est tant mieux. Le terme apronte a diffĂ©rentes significations allant du domaine des courses de chevaux, notamment la phase de prĂ©paration du cheval, en passant par une personne impatiente, ou une personne payant pour obtenir quelque chose. C’est aussi la prĂ©paration, d’un mauvais coup ou d’une passe. En gros, difficile de savoir sans les paroles ce que voulait Ă©voquer Firpo. Cependant, sa musique est en gĂ©nĂ©ral expressive et l’utilisation d’un tango milonga avec ses hĂ©sitations et son rythme irrĂ©gulier peut s’adapter Ă  chacun des sens.
PrĂ©cisons un dernier sens, plus « respectable Â» qui nous vient d’Uruguay, n’oublions pas que c’est Ă  l’époque oĂč il Ă©tait contractĂ© par le cafĂ© la Giralda qu’il rencontre Gerardo Matos RodrĂ­guez et inaugure sa marche de carnaval (la Cumparsita). En Uruguay, donc, apronte peut signifier aussi l’apport pour le mariage. La dot, ou tout simplement la prĂ©paration de la vie commune.
Notons que les paroles de tango s’appelant apronte ou citant ce mot possĂšdent des paroles plutĂŽt vulgaires, mafieuses et se rĂ©fĂšrent donc Ă  l’acception portĂšgne du mot. Par exemple pour le tango Apronte de Celedonio Flores.
Mais ici, comme c’est instrumental, vous pouvez imaginer ce que vous voulez


Autres versions

Sur la partition que je vous ai prĂ©sentĂ©e ci-dessus, il y a une indication que je souhaite vous prĂ©senter. Il est indiquĂ© « Tango Milonga Â».

Nous avons dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© ces tangos canyengue qui au fil du temps sont jouĂ©s plus vite et qui deviennent des milongas, mais je souhaite attirer votre attention sur le concept de « tango milonga Â». Ce sont des tangos assez joueurs, mais pas suffisamment syncopĂ©s et rapides pour mĂ©riter le titre de milonga. Ils sont donc entre les deux. Firpo interprĂšte souvent des tangos avec cette ambiguĂŻtĂ©, comme d’autres orchestres plus tardifs comme Miguel Villasboas. Ici, nous sommes en prĂ©sence d’un tango Ă©crit par Firpo, il a donc dĂ©cidĂ© de lui donner le rythme qu’il affectionne, le Tango Milonga.
Pour un DJ, c’est un peu un casse-tĂȘte. Faut-il l’annoncer comme un tango ou comme une milonga ? Je passe souvent ce type de titre quand j’ai besoin de baisser la tension, Ă©ventuellement Ă  la place d’une tanda de milonga, surtout si les danseurs ne sont pas des aficionados de la milonga. A contrario, s’ils adorent la milonga, je peux colorer une tanda de tango pour leur donner l’occasion de jouer un peu plus. J’annonce au micro ce qui va se passer, car trĂšs peu de danseurs connaissent cette catĂ©gorie. Cela me permet aussi d’encourager ceux qui sont timides en milonga en leur disant que c’est une milonga « facile Â».
Le tango du jour interprĂ©tĂ© par D’Arienzo est un pur tango. Cependant, certaines versions que nous allons voir Ă  prĂ©sent sont des tangos milonga, comme, c’est le cas pour celles enregistrĂ©es par Roberto Firpo, l’auteur de la partition.

El apronte 1926 — Orquesta Roberto Firpo.

Bien qu’enregistrĂ©e 12 ans aprĂšs l’écriture, cette version respecte l’esprit de la partition originale et est un Tango Milonga, avec ses syncopes caractĂ©ristiques.

El apronte 1931-10-07 — Orquesta Roberto Firpo.

Cette version est beaucoup plus lisse. Les syncopes sont beaucoup plus rares et la marcaciĂłn est rĂ©guliĂšre. C’est une interprĂ©tation plus moderne.

El apronte 1937-03-27 — Orquesta Roberto Firpo.

Retour en forcĂ© du style Tango Milonga. Firpo revient Ă  la lettre de sa partition. C’est sa sonoritĂ© fĂ©tiche que l’on retrouvera notamment sur des orchestres uruguayens comme Villasboas ou chez la Tuba Tango.

El apronte 1937-04-01 — Orquesta Juan D’Arienzo. C’est le tango du jour.

C’est clairement un tango et pas un Tango Milonga. La marcacion est trĂšs rĂ©guliĂšre et les fantaisies principalement proposĂ©es par Biagi au piano se font essentiellement sur les moments de silence des autres instruments. Ainsi le rythme, le compas rĂ©gulier de d’Arienzo n’est pas bousculĂ©, il est juste mis en pause pour laisser quelques fractions de secondes au piano, ou pour mĂ©nager un silence qui rĂ©veille l’attention des danseurs, ce qui deviendra un Ă©lĂ©ment caractĂ©ristique de son style avec des breaks parfois trĂšs longs. Vous savez, ces moments oĂč les danseurs peu expĂ©rimentĂ©s se tournent vers le DJ en pensant qu’il y a une panne
 J’avoue, il m’arrive de jouer en mettant rĂ©ellement en pause certains breaks (ils sont donc plus longs) pour provoquer des sourires chez les danseurs que je rassure par des signes prouvant que c’est normal 😉

El apronte 1971 — Miguel Villasboas y su Orquesta Típica.

On retrouve le Tango Milonga qui est un jeu qu’adore utiliser VIllasboas. La boucle est bouclĂ©e.

Merci d’ĂȘtre arrivĂ©e au bout de cet article.
N’hĂ©sitez pas Ă  laisser des commentaires mettre un j’aime (le pouce vers le haut en dĂ©but d’article ou m’envoyer un petit message).

Pour finir, choisissez l’image que vous prĂ©fĂ©rez pour le tango du jour.