Je t\u2019ai rencontr\u00e9e quand j\u2019\u00e9tais \u00e9tudiant aux poches plates (fauch\u00e9, sans le sou) et le Paris de la nuit de l\u2019\u00e9poque envoyait dans l\u2019espace en une cascade de lumi\u00e8res le r\u00e8gne \u00e9ph\u00e9m\u00e8re de ton pr\u00e9nom, Mademoiselle Ivonne<\/em><\/p>\n\n\n\nCommence ici la partie chant\u00e9e.<\/mark><\/p>\n\n\n\nMademoiselle Yvonne \u00e9tait une poup\u00e9e (p\u00e9p\u00e8te, jeune femme)<\/mark> qui, dans le quartier dit du vieux Montmartre (quartier populaire de Paris, accueillant de nombreux artistes)<\/mark>, de son air courageux de grisette (couturi\u00e8re, lavandi\u00e8re, femme modeste, habill\u00e9e de gris. Elle se diff\u00e9rencie de la Lorette qui elle fait plut\u00f4t profession de ses charmes)<\/mark> joyeuse \u00e9gayait les festivit\u00e9s de ce boulevard (le boulevard Montmartre)<\/mark>.<\/em>Elle \u00e9tait la Papusa du Quartier latin (Papusa, une jolie fille. Quartier \u00e9tudiant de Paris, elle devait faire tourner les c\u0153urs des jeunes gens)<\/mark> qui savait susciter des po\u00e8mes, jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019un beau jour un Argentin tomb\u00e2t et fit soupirer la petite Fran\u00e7aise.<\/em>Madame Ivonne<\/em>La Croix du Sud fut comme un signe.<\/em>Madame Ivonne. C\u2019\u00e9tait comme le signe de ta chance.<\/em>Alouette grise (La alondra est un oiseau matinal. On donnait ce surnom \u00e0 ceux qui se levaient t\u00f4t et se couchaient t\u00f4t, Yvonne \u00e9tait donc une travailleuse honn\u00eate)<\/mark>.<\/em>Ta douleur m\u2019\u00e9meut, ton chagrin est de neige (il peut s\u2019agir d\u2019une vision po\u00e9tique, mais plus s\u00fbrement de la coca\u00efne qui se d\u00e9signe par \u00ab\u2009nieve\u2009\u00bb en lunfardo. Ces deux indications la r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 l\u2019alouette du pass\u00e9 et \u00e0 la coca\u00efne d\u2019aujourd\u2019hui, content en deux phrases toute l\u2019histoire)<\/mark>.<\/em>Madame Ivonne<\/em>Cela fait dix ans que Mademoiselle a quitt\u00e9 la France. Aujourd\u2019hui c\u2019est seulement Madame. Comme beaucoup de Fran\u00e7aises dans son cas, elle a d\u00fb devenir g\u00e9rante d\u2019un bordel et acqu\u00e9rir le \u00ab\u2009titre\u2009\u00bb de Madame.<\/mark> celle \u00e0 qui tout para\u00eet lointain (elle se d\u00e9sint\u00e9resse de ce qui se passe autour d\u2019elle)<\/mark>, avec ses yeux tr\u00e8s tristes, elle boit son champagne (cela confirme qu\u2019elle doit \u00eatre la chef de la maison close. Il ne s\u2019agit pas de v\u00e9ritable Champagne, encore aujourd\u2019hui, les Argentins nomment ainsi les vins mousseux, ce qui \u00e9nerve les viticulteurs fran\u00e7ais. Ils font de m\u00eame avec le Roquefort\u2026).<\/mark><\/em>Elle n\u2019est plus la Papusa du Quartier latin, elle n\u2019est plus la fleur de lys fauch\u00e9e (Mistonga en lunfardo est pauvre. Je trouve que faucher la fleur de lys, c\u2019est une belle image. Le lys est un symbole royal, mais aussi de puret\u00e9, de virginit\u00e9, ce qui confirme discr\u00e8tement que l\u2019activit\u00e9 actuelle de Madame Ivonne n\u2019est pas des plus pures)<\/mark>. Il ne reste plus rien d\u2019elle, pas m\u00eame cet Argentin qui, entre tango et mat\u00e9, l\u2019a enlev\u00e9e de Paris. D\u00e9j\u00e0 les ravages du tango qui \u00e9tait une folie \u00e0 Paris dans les ann\u00e9es\u00a020. Le mat\u00e9 est bien s\u00fbr el mate, la boisson indispensable aux Argentins.<\/mark><\/em>Madame Ivonne<\/em>La Croix du Sud \u00e9tait comme un signe. La Croix du Sud est la constellation qui marque dans le ciel nocturne de l\u2019h\u00e9misph\u00e8re austral, le Sud<\/mark>.<\/em><\/p>\n\n\n\nAu rythme d\u2019un tango<\/h2>\n\n\n\n Le m\u00eame jour, Tanturi et Castillo ont enregistr\u00e9e Al comp\u00e1s de un tango<\/em><\/strong>. Les deux tangos pourraient \u00eatre associ\u00e9s. En effet, le th\u00e8me est un copain qui essaye de r\u00e9conforter son ami qui est d\u00e9sesp\u00e9r\u00e9 \u00e0 cause d\u2019une femme. Son conseil, aller danser\u2026<\/p>\n\n\n\n<\/audio>Al comp\u00e1s de un tango 1942-03-18 \u2014 Orquesta Ricardo Tanturi con Alberto Castillo (Alberto Su\u00e1rez Villanueva Letra Oscar Rubens)<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\nMademoiselle Yvonne et Madame Yvonne. \u00ab\u2009Dix ann\u00e9es\u2009\u00bb s\u00e9parent ces images. Je n\u2019ai pas forc\u00e9 sur les cernes d\u2019Ivonne fatigu\u00e9e par la drogue, le champagne et le chagrin<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\nQuelle image choisir\u2009?<\/h2>\n\n\n\n L\u2019illustrateur d\u2019un texte est toujours confront\u00e9 \u00e0 des choix. Doit-il faire une belle image ou rester fid\u00e8le au texte. C\u2019est effectivement un dilemme. Pour l\u2019image de couverture, j\u2019ai r\u00e9alis\u00e9 une image \u00ab\u2009entre deux\u2009\u00bb. Elle n\u2019est plus la jeune femme insouciante de Paris, mais pas encore la tenanci\u00e8re drogu\u00e9e du bordel port\u00e8gne. Cela me semblait plus convenable pour pr\u00e9senter l\u2019article. Pour la derni\u00e8re image, je souhaitais faire appara\u00eetre la d\u00e9cennie et ses ravages. J\u2019ai donc test\u00e9 diff\u00e9rentes options pour choisir celle ci-dessus qui ne fait pas appara\u00eetre que la diff\u00e9rence d\u2019\u00e2ge que j\u2019ai amplifi\u00e9e, disons \u00e0 20\u00a0ans au lieu des 10 du tango. Mais dans cette image, il est difficile de voir les ravages caus\u00e9s par le chagrin et la vie nocturne et sous l\u2019emprise de l\u2019alcool et de la drogue. Il me fallait donc aller plus loin.Si vous avez l\u2019\u00e2me sensible, arr\u00eatez de lire le texte ici et ne regardez pas les images qui suivent<\/strong>.<\/p>\n\n\n\nYvonne est la m\u00eame. Par contre, j\u2019ai beaucoup vieilli Ivonne et je lui ai donn\u00e9 sans doute un peu trop d\u2019\u00e2ge. Pardon, Ivonne.<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\nL\u00e0, j\u2019ai un peu plus fait tomber les traits d\u2019Ivonne, tout en lui enlevant un peu d\u2019\u00e2ge pour \u00eatre plus proche des paroles. Je lui ai rajout\u00e9 les cernes violets et pendant que j\u2019y \u00e9tais, je lui ai rougi les yeux et agrandi les pupilles. Je crois que c\u2019est une caract\u00e9ristique provoqu\u00e9e par la drogue. La seule que je prends, c\u2019est la musique de tango, celle qui a des effets euphorisants, m\u00eame \u00e0 forte dose.<\/figcaption><\/figure>\n\n\n\nVous aurez peut-\u00eatre remarqu\u00e9 le fond qui est le m\u00eame pour toutes les images. Je l\u2019ai con\u00e7u pour un article traitant du r\u00f4le de la France dans le tango. Pour vous remercier d\u2019avoir lu jusqu\u2019au bout, voici le fond, tout seul\u2026<\/p>\n\n\n\nJe vous jure que ma seule drogue, c\u2019est la musique. C\u2019est ainsi que je vois les m\u00e9langes culturels entre la France et l\u2019Argentine, les deux pays rois du cambalache<\/figcaption><\/figure>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"Madame Ivonne, est l\u2019histoire d\u2019une vie r\u00e9sum\u00e9e en trois minutes. Comme Mademoiselle Yvonne, des milliers de jeunes femmes ont v\u00e9cu l\u2019illusion de l\u2019amour et ont r\u00eav\u00e9 de la Croix du Sud, Croix sur laquelle, nombre d\u2019entre elles ont \u00e9t\u00e9 clou\u00e9es par la tristesse. Je vous invite \u00e0 d\u00e9couvrir la version de Tanturi et Castillo, mais aussi d\u2019autres versions pleines d\u2019\u00e9motion. Pr\u00e9parez votre mouchoir.<\/p>\n