Archives mensuelles : mai 2010

Les cortinas, levons le voile sur cette tradition

Origine de la cortina

Il y a plusieurs explications Ă  l’origine de l’utilisation des cortinas.
L’une d’entre-elle Ă©tait le changement d’orchestre qui donnait lieu Ă  la fermeture du rideau de scĂšne (Telon ou Cortina) pour que les orchestres s’installent plus discrĂštement.
Une autre vient de la nĂ©cessitĂ© de donner du temps au DJ pour prĂ©parer la tanda suivante Ă  l’Ă©poque oĂč les DJ utilisaient des cassettes.
Mais la cortina fait dĂ©sormais partie intĂ©grante de la milonga, mĂȘme s’il n’y a plus les contingences techniques du dĂ©but.

Nous allons voir pourquoi.

Les cortinas sont des coupures dans un bal tango

Elles servent Ă  marquer les changements de style de musique (changement d’orchestre, de style de danse
). En effet, le tango est organisĂ© par tandas, groupe de trois ou quatre compositions semblables qui permettent Ă  un couple de danseurs d’aller plus loin dans l’expĂ©rience. La premiĂšre danse pour s’apprivoiser, les suivantes pour danser de mieux en mieux, en parfaite harmonie.

Quelle musique pour les cortinas ?

Généralement, une cortina ne se danse pas. Il faut donc éviter de mettre des danses, comme du rock, car certains danseurs risquent de la danser et par conséquent, ils ne libéreront pas la piste.
Il y a deux pratiques, celle qui consiste Ă  mettre des cortinas diffĂ©rentes, Ă©ventuellement sur un thĂšme tout au long de la soirĂ©e et une autre qui consiste Ă  mettre tout le temps la mĂȘme cortina dans la soirĂ©e.
Certains DJ utilisent mĂȘme la mĂȘme cortina pour toutes leurs milongas.
Toutefois, la mode fait que maintenant, on privilĂ©gie les milongas variĂ©es. Cela permet d’avoir plus d’action sur l’ambiance de la milonga et de tester la disponibilitĂ© des danseurs aux diffĂ©rents intermĂšdes.

Pourquoi des cortinas ?

Pour moi, la cortina est d’abord associĂ©e Ă  la mirada. Il faut que la piste soit dĂ©gagĂ©e pour que les invitations au regard puissent se faire. De cela dĂ©coule un autre point, il faut des siĂšges pour les danseurs pour Ă©viter qu’ils encombrent la piste.

Si ces conditions idéales ne sont pas réunies, on peut effectivement se poser la question de la cortina. Voici quelques réflexions qui la justifient.

  • La tanda est une coupure dans le flux de la danse.
  • Elle permet de se rĂ©Ă©quilibrer des Ă©motions de la tanda prĂ©cĂ©dente et de se prĂ©parer Ă  la suite.
  • Elle permet une discussion plus libre et une socialisation, trĂšs importante pour les Argentins et qui peut se traduire par des Ă©changes vocaux parfois soutenus

  • Les danseurs dĂ©butants et ceux qui n’écoutent pas la musique ne se rendent pas toujours compte du changement de style de la musique et donc de la fin d’une tanda. Le problĂšme est qu’alors la danseuse abandonnĂ©e au milieu d’une tanda se retrouve dĂ©calĂ©e par rapport aux autres danseurs qui ne seront disponibles qu’à la fin de la tanda. Certains DJ rendent les choses encore plus difficiles en mĂ©langeant dans une tanda des styles qui ne vont pas ensemble


Cette interrogation sur les cortinas est assez typique des danseurs qui manquent un peu d’expĂ©rience. Lorsque l’on a goĂ»tĂ© Ă  l’ambiance des belles milongas traditionnelles, il est difficile de revenir en arriĂšre et de trouver du plaisir dans des milongas dĂ©cousues, oĂč les musiques s’enchaĂźnent sans ordre et sans pause. Chaque tanda est un petit voyage avec la danseuse. Si on prend la tanda en cours, ce voyage sera rĂ©duit, mais il aura une logique. Si on reste Ă  cheval sur deux tandas, on risque de se trouver dans une situation oĂč l’on n’a pas envie de danser la seconde tanda avec cette danseuse.

L’élĂ©gance veut que l’on n’invite pas une danseuse sur les derniers morceaux d’une tanda pour ne pas donner l’impression que l’on fait un « test ». Pourtant, cela se pratique rĂ©guliĂšrement et une danseuse peu invitĂ©e prĂ©fĂ©rera sans doute deux danses Ă  rien
 Et puis, si la tanda suivante vous plaĂźt Ă  tous les deux, vous pouvez toujours vous rĂ©inviter du regard, cette fois-ci pour une tanda complĂšte.

Je vois cependant deux occasions oĂč la cortina peut ĂȘtre une gĂȘne, au tout dĂ©but de la soirĂ©e, lorsque le bal n’a pas vraiment dĂ©marrĂ©, il m’arrive de ne pas mettre de cortina pour faire lever plus rapidement les gens. L’autre cas est la milonga « boĂźte de nuit » (souvent utilisĂ© pour les milongas alternatives), oĂč on recherche plus la transe que le voyage avec une danseuse. Dans ce cas, on garde les danseurs sur la piste, le but Ă©tant de ne jamais les lĂącher.

Une derniĂšre remarque, lorsqu’il n’y a pas de cortina, les danseurs tendent Ă  garder leurs danseuses plus longtemps, de crainte de ne pas pouvoir en inviter une autre. En effet, comme tout le monde est sur la piste, lorsque l’on arrĂȘte, on risque de se retrouver sans possibilitĂ© d’inviter. Lorsqu’il y a beaucoup de danseuses qui attendent, il m’arrive de faire des tandas de trois pour permettre une rotation plus rapide. Sans cortina, les danseurs feraient six danses au lieu de trois ou quatre.